Prédire l’évolution des dépenses publicitaires des annonceurs sur les mois à venir est un véritable défi. « Il faut s’attendre à des révisions des estimations actuelles face aux incertitudes en matière d’économie » prévient Daniel Knapp, le Chief Economist de l’IAB (Interactive Advertising Bureau) en Europe.
Des estimations pour 28 pays européens
Quoiqu’il en soit, il a présenté le 3 juin les prédictions d’évolution des dépenses publicitaires des annonceurs pour 2020 et au-delà. Les données concernent 28 pays européens, dont les pays de l’Est, la Suisse, la Russie et la Grande Bretagne. L’association IAB réunit les professionnels de la publicité sur internet.
Lors des crises précédentes, il a fallu 3 ans avant que les dépenses en publicité ne retrouvent leur niveau d’avant crise
Dans le scénario de base – plutôt optimiste – proposé par l’IAB, tous les pays européens retournent à la croissance des dépenses publicitaires – tous médias compris – en 2021. La France vivrait ainsi une baisse globale des budgets d’environ -18% en 2020 pour redémarrer avec une croissance de +8% en 2021, et récupérerait en 2021 88,3% des dépenses réalisées en 2019, une année qui est un pic de dépenses publicitaires. En Grande Bretagne, la reprise serait plus rapide avec 93% des dépenses de 2019 récupérées en 2021. Idem pour l’Allemagne. Ces prédictions de l’IAB s’appuient les prédictions les plus optimistes du FMI (Fonds Monétaire International).
Un creux des budgets publicitaires de -13,5% en 2020
Trois scénarios plus critiques sont toutefois définis par le FMI. L’IAB propose donc 3 estimations alternatives. Pour rappel, dans le scénario de base, le creux des budgets publicitaires pour l’Europe est de -13,5% en 2020, pour rebondir à +9,4% de croissance en 2021 (par rapport à 2020). Dans une première alternative, dans laquelle une autre épidémie aurait lieu en 2021, le recul serait de -13,5% en 2020, de -4,9% en 2021 et la croissance reviendrait en 2022, avec +1,7%.
Si l’épidémie devait durer, le recul des dépenses publicitaires en 2020 atteindrait -22,1%
Dans le détail, le recul des dépenses publicitaires pour toute l’année 2020 – tous médias confondus, tenant compte des données du FMI et de la réponse des Etats – s’établit à -18,1% à la baisse pour la France, à -13,3% pour la Grande Bretagne, à -14,1% pour l’Allemagne, et à -14,3% pour les Etats Unis.
Le digital devrait redémarrer plus vite que les autres médias
En ce qui concerne le digital, les perspectives calculées en mai par l’IAB sont déjà plus optimistes que celles calculées en avril. En revanche, les prédictions de dépenses publicitaires sur les autres médias empirent. Si on considère le total des dépenses publicitaires en Europe, tous médias confondus, le recul moyen était prévu à -16,3% en avril. Il a été ramené à -13,5% en mai.
« Les formats publicitaires qui ont les meilleures performances sont ceux qui redémarreront le plus vite »
En revanche, pour les autres médias que le digital, les prédictions de l’IAB empirent. D’un recul estimé à -20,4% en avril, Daniel Knapp passe à une prédiction de recul de -21,3% en mai. Le recul des dépenses en publicité digitale au niveau européen devrait s’atténuer au fil des mois selon l’IAB. En juin 2020, le recul des dépenses publicitaires devrait être de l’ordre de 12% pour le Search et d’environ 5% pour les réseaux sociaux. Puis au 4ème trimestre 2020, les dépenses en Social média devraient retrouver une croissance de +7%. Les dépenses en Search seraient en croissance de 4,3%. La vidéo verrait une croissance de 7,7% et les bannières Display retrouveraient une courte croissance de 0,2%.
Dans les scénarios de rebond rapide des dépenses publicitaires digitales en Europe, la bonne santé des PME qui annoncent sur les canaux digitaux est cruciale, s’inquiète l’IAB. C’est que les PME représentent une grosse part des dépenses publicitaires, mais elles sont beaucoup plus fragiles que les grands groupes car elles ne disposent pas des mêmes facilités de paiement.
En Europe, les PME représentent 44,2% des dépenses publicitaires, tous médias confondus. L’IAB cite également les Etats Unis, où les grands groupes représentent 40% des dépensent en publicité digitale, alors que les PME représentent 72% des budgets publicitaires digitaux et 74% des budgets publicitaires sur les réseaux sociaux et le Search. Les prestataires de publicité digitale sont donc nettement plus dépendants des PME que des grands groupes, si l’on suppose que cette répartition américaine s’applique également à l’Europe. Les PME n’ont pas les réserves financières ni les facilités de crédit dont disposent les marketeurs des grands groupes pour redémarrer rapidement des actions publicitaires digitales, craint l’IAB. En revanche, dans les PME, le marketing est directement lié aux ventes. Dès lors, si les ventes peuvent reprendre, alors les dépenses publicitaires reprendront, estime l’IAB.